Danse 2700 - 5 juin 2022
15h44, rue de Seine, Paris 6e.
Aujourd’hui c’est la 2700e. Cela fait 7 ans et demi que je n’ai pas raté un jour… Je voudrais faire quelque chose d’un peu spécial, mais je suis K.O, un peu sonnée par des mois d’activité intense et la dureté de l’actualité. Je laisse un message à deux amis danseurs, mais ils ne sont pas à Paris. Je pars donc seule à la recherche d’un cadre vers 14h30. J’ai mis ma robe préférée pour me donner du courage et honorer l’occasion. Une heure plus tard, je trouve une palissade peinte, que mon amie Isabelle m’avait signalée. Il y a beaucoup de passage. Je fais deux prises, en laissant ma caméra sans surveillance au milieu de la rue (où peu de voitures passent) et mon sac au bord du trottoir…
Dans la première, la cadre est en partie bloqué par une voiture, l’image est bancale. Les passants ne voient pas la caméra ils passent dans le cadre, ce qui est parfait. C’est drôle, même si j’ai l’habitude, de voir que la plupart m’ignorent totalement en passant à 20 cm de moi, en dépit de la danse que je leur adresse.
Dans la seconde, celle que j’ai finalement choisie, la voiture qui était là précédemment ne cache plus ma caméra. Les gens, croyant qu’il me gêneraient en passant, font un détour pour ne pas être dans le champ. Il y a du monde hors-cadre. Un monsieur élégant, d’un certain âge, reste tout du long. À la fin lorsque je reviens vers ma caméra, il s’exclame : « c’est bien ! »
Je ris et le remercie.
Il me dit : « Ce qui compte, c’est de le faire ! »
Je suis étonnée de sa perspicacité et je ris à nouveau. Je réponds :
- Oui, c’est vrai. Ce n’est pas du tout pareil de le faire et de ne pas le faire.
- C’est important.
- … je fais cela tous les jours… c’est la huitième année.
- Ah bon ?
- Oui, pour emmener l’art, la danse, dans les interstices du quotidien, dans les interstices de la ville.
- ah…. l’art c’est un grande question. Il y a beaucoup à dire.
Je ris encore. Il me souhaite le meilleur pour la suite et me dit que c’est important d’avoir pris le soin du vêtement.
Décidément, ce monsieur m’épate.
Lorsque je rentre chez moi, il est 17h00.
Je sais que j’ai encore deux heures de mise en ligne. Cela fera 4 heures 30 entre le point d’entrée et le point de sortie. C’est comme ça. La minute me demande ça. C’est le 2700e jour. Le monde a changé depuis que j’ai commencé. Il est comme ça le monde, il change et nous aussi…
Je vous souhaite un beau dimanche soir.
Street art : Pablo Cots